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Crime passionnel : retour sur une « liaison » qui a viré au drame à Thiès !

En mars 2020, le 15 précisément, la région Thiès est secouée par un cas de féminicide. A Keur Saïb Ndoye, le corps sans vie d’une adolescente est retrouvé. Khady Diouf ! Disparue depuis la veille, celle-ci a perdu la vie dans des circonstances atroces. En hommage à toutes les victimes, en ce mois de mars, Seneweb dépoussière ce dossier. Flashback !

Ce dimanche 15 mars 2020, les habitants de Médina Fall se réveillent dans la torpeur. L’inquiétude est à son paroxysme. Depuis la veille, Khady Diouf, une jeune résidente du quartier demeure introuvable. Celle-ci a d’ailleurs été vue pour la dernière fois la veille vers 21h.

L’espoir planait toujours chez l’adolescente jusqu’au moment où ils eurent vent d’une rumeur qui laisse entendre qu’une découverte macabre a été faite vers 1h du matin sur la route menant à Keur Saib Ndoye, près de l’hôpital Dalal Khel. Celui-ci est d’ailleurs déjà acheminé à la morgue de l’hôpital Amadou Sakhir Ndiéguène de Thiès. Après vérification, Awa Ndiaye, mère de la jeune Khady, se rend à l’évidence. Cette fille vêtue d’un blouson rouge, allongée devant elle, voile à moitié défaite, est bien sa fille.

Le constat d’usage révèle que la victime a été retrouvée avec une corde sévèrement nouée à son cou. L’autopsie révèle d’ailleurs que Khady est décédée des suites d’un traumatisme du cou avec luxation du rachis cervical combinée d’une hémorragie interne. La thèse du viol est écartée. Mais alors, qui a bien pu en vouloir autant à cette jeune fille de 15 ans pour lui infliger un tel supplice ?

La « liaison »

Les premières auditions de l’enquête préliminaire pointent toutes vers une seule piste. Un dénommé Serigne Assane Fall, fils du guide des Baye Fall de Kawsara.

« Ma fille ne sortait jamais la nuit à mon insu. En journée, elle partait apprendre le coran à Rouhou Baye Fall, puis s’en allait aider une de mes amies dans sa boutique. Le jour des faits, aucun membre de la famille ne l’a vu sortir. Seuls les voisins d’en face l’on vu discuter devant la maison avec l’un des disciples de son maître coranique. Puis, ils ont pris la route de Roukhou Baye Fall. Seulement, elle n’est plus rentrée. Vers minuit, lorsque nous y avons été pour la chercher, les individus sur place rassurent n’avoir vu personne. Seulement j’avais un mauvais pressentiment, de ce fait, j’insistais pour voir Serigne Assane Fall », s’alarme Awa Ndiaye, mère de Khady.

La piste révèle ainsi que Khady se rendait régulièrement à Roukhou Baye Fall pour y apprendre le coran. Seulement, deux jours avant le meurtre, Awa Ndiaye découvre que sa fille âgée de 15 ans est en état de grossesse. Et cela depuis déjà deux mois. Le nom de l’auteur des faits la laisse sans voix. Serigne Assane Fall, reconnaît cela d’ailleurs devant les proches de Khady qui étaient partis le voir afin de s’enquérir des faits. Cependant, la mère de Khady affirme qu’il les a suppliés de ne point ébruiter l’affaire.

« Lorsque j’ai toqué plusieurs fois à sa porte, il a ouvert mais ne semblait pas du tout dormir. Puis, avant même de demander après ma fille, Serigne Assane me redonnait sa parole, affirmant qu’il prendra amplement ses responsabilités, qu’il marierait ma fille après son accouchement. Que son père ne doit en aucun cas apprendre ce qui s’est passé, d’autant plus qu’il détient une certaine notoriété au sein du quartier. Seulement quand j’ai demandé après Khady il jura ne l’avoir vue et ce, depuis le jeudi », remarque-t-elle.

Un paradoxe survient alors, car l’autopsie n’a guère mentionné de grossesse. Seulement, la sage-femme ayant effectuée le test soutient dur comme fer que ce dernier était positif. A L’unanimité, les proches de la victime confirment aussi cette thèse. Interpellé avec deux de ses disciples, le suspect se livre assez rapidement aux confessions.

« Il fallait qu’elle arrête de dire partout que j’étais l’auteur des faits »

Devant les enquêteurs, Serigne Assane Fall soutient qu’il ne voulait point que son père apprenne sa maladresse. Seulement, presque tout le quartier était désormais au courant, et pour lui, ôter injustement la vie de la jeune fille était la seule issue.

« Nous étions ensemble depuis peu de temps. Toutefois, quand sa mère me fit part de son état, j’ai compris que l’affaire allait très vite prendre de l’ampleur. D’ailleurs, la rumeur n’a pas tardé à gagner du terrain. Mes disciples me ramenaient les échos. Je l’ai fait appeler la nuit du samedi. Puis à l’aide d’une corde que j’avais dans ma poche, j’ai mis fin à ses jours. Il fallait qu’elle arrête de dire partout que j’étais l’auteur des faits, mon père ne devait guère être mis au courant, ce serait un déshonneur pour lui », confia-t-il.

Poursuivi pour pédophilie et assassinat, le 20 mars 2020, à la maison d’arrêt et de correction de Thiès, Serigne Assane Fall est placé sous mandat de dépôt.

Une autre version

Le lundi 27 novembre 2023, trois ans après l’effroyable assassinat de la jeune Khady Diouf, son présumé meurtrier est attrait à la barre devant la chambre criminelle de Thiès. Revenant sur le jour des faits, le jeune marabout met en avant d’autres arguments, redéfinissant ainsi, le mobile du meurtre.

« Ce jour-là, quand elle a répondu à mon appel, nous étions à bord de mon véhicule. Je lui ai demandé qui était vraiment l’auteur de son état. Elle m’affirma alors que c’était son oncle. Sa trahison m’a fait très mal, d’autant plus que je comptais l’épouser. Je ne voulais pas en arriver là… Après son dernier souffle, je la plaçais dans la malle, avant de l’abandonner près de l’hôpital », se dédouane-t-il. Une nouvelle version qui n’enlève en rien la pesanteur de la sentence requise par le procureur : la réclusion à perpétuité.

Partie à la fleur de l’âge

A quinze ans, Khady Diouf avait déjà fini l’apprentissage du coran. Voilée, un sourire innocent faisait sa beauté. Une complicité la liait à sa mère, elle ne lui cachait rien d’ailleurs. Toutefois, cette fois-ci, Awa Ndiaye n’a rien vu venir. Sa benjamine était sous le choc même à l’annonce de sa grossesse, et ce comportement faisait croire à son cœur de mère, que sa petite fille n’était guère consentante. « Ma fille ne pouvait pas commettre de plein gré ce péché. J’ai foi aux valeurs que je lui ai inculquées. Sa naïveté, et son silence l’ont conduit à la tombe. »

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