Depuis ce dimanche soir, sa photo et son nom font le tour de la toile. Bassirou Diomaye Faye est « intronisé » par Ousmane Sonko, pour porter le « projet » de l’ex-Pastef en perspective de la présidentielle de février 2024. Du moins dans cette phase des parrainages. Ce qu’il faut savoir sur ce « clone » du maire de Ziguinchor, qui l’a rejoint en prison.
« (…) Le yo-yo judiciaire dans lequel ils veulent embourber le pays relève du dilatoire, conforté par la forfaiture administrative de la Direction générale des élections (DGE) et du ministère de l’Intérieur, pour refuser de remettre les fiches de parrainage du Président Ousmane Sonko, porteur du projet, jusqu’au 11 décembre, date du début des dépôts des candidatures. Inédit dans l’histoire du Sénégal. C’est en réponse à cela que, après nous être concertés tous les quatre, et après avoir fait valider notre décision par le Président Ousmane Sonko, nous demandons unanimement à tous les Sénégalais de lancer, à compter de ce lundi 20 novembre 2023, la campagne de parrainage du projet en faveur du candidat Bassirou Diomaye Faye ». C’est en substance ce qui est ressorti de la déclaration des quatre candidats à la candidature, issus de l’ex-Pastef.
En prison depuis le 18 avril dernier, pour avoir fait un post sur Facebook où il aurait dénigré les magistrats sénégalais, Bassirou fait partie des profils déjà plébiscités pour porter « légitimement » le « projet » d’Ousmane Sonko, dont il est très proche
Fils d’un responsable socialiste à Ndiaganiao, proche de Niadiar Sène, le secrétaire général du Syndicat des agents des impôts et domaines est, pour beaucoup, le double de son mentor. « Il est le clone d’Ousmane Sonko », nous siffle-t-on : « Même fougue, même verve, même tempérament, même amour pour les arts martiaux, même look : souvent crâne rasé, barbe bien taillée ».
Homme timide, mais polémiste redoutable
En tout état de cause, le président du Mouvement national des cadres patriotes (Moncap) peut se targuer d’être parmi les premiers qui ont cru au projet Pastef/Les patriotes, même s’il ne fait pas partie de ses géniteurs. Au quotidien « L’As », il confiait : « J’ai eu l’honneur de concevoir la feuille de route du comité de pilotage provisoire qui a été mis en place, à l’occasion de l’assemblée générale du 4 janvier 2014 ».
Âgé de 41 ans, il boxe déjà dans la cour des grands. Derrière ses apparences d’homme candide, à la limite timide et sans histoire, se cache une personne belliqueuse, prête à utiliser même des armes non-conventionnelles pour déstabiliser ses adversaires.
En plus clair, « BDF », comme l’appellent affectueusement « les Patriotes », est incontestablement sur les pas de son charismatique leader. Son flegme britannique et sa voix posée ne doivent pas tromper. Car cet ancien pensionnaire de la mission catholique et du Cem de Ndiaganiao qui porte le nom de son grand-père Macor est un polémiste redoutable et craint. La réponse salée qu’il avait adressée à Yakham Mbaye dans une contribution qui avait fait le tour des réseaux sociaux et dénommée: «Les vains aboiements d’un chiwawa » en est une parfaite illustration.
Très critique à l’encontre du régime en place, ce Sérère qui se laisse entrevoir dans l’éclat de sa noirceur et dans son élocution, ne porte pas de gants quand il s’agit de servir une réponse du berger à la bergère. Ce fut le cas lors de son face-à-face avec Me El Hadji Diouf. La robe noire qui pourtant d’habitude jubile devant l’adversité, n’a pu supporter les attaques de l’acolyte d’Ousmane Sonko.
Ancien élève du Lycée Demba Diop de Mbour où il a obtenu le baccalauréat en 2000, Bassirou Diomaye Faye a aussi un regard pointu sur les questions qui touchent à l’Etat, mais aussi la bonne gouvernance. Normal, il est breveté de l’ENA (École nationale de l’administration), après une maîtrise en Droit obtenue en 2004 à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad).
Révélé au grand public après la création du Pastef, il y a 9 ans (2014), l’inspecteur des impôts affirme que son entrée en politique est une surprise. «Il ne me traversait pas l’esprit de faire de la politique, car quand vous avez un parent qui fait de la politique, de prime abord, vous avez horreur de la politique parce que vous voyez le manque de temps. Vous voyez la pénibilité de l’engagement, vous voyez les absences répétées du pater», confiait-il au journal « L’As ».
Diomaye et « la fibre de refus » de don père
Mais c’est a priori l’engagement de son père qui a milité au Parti socialiste qui l’a poussé à emprunter ce chemin. «Vous ne vous rendez pas compte en même temps que ce qui fait l’engagement de votre pater a dû vous laisser une quelconque fibre de refus qui fait que vous ne pouvez pas supporter beaucoup de choses. Des choses que vous trouvez anormales et que vous devez combattre», indiquait-il à nos confrères.
D’autant que pour le secrétaire général du Syndicat des Domaines, entre le syndicalisme et la politique, il n’y a qu’un pas de franchi. «Je pense que le syndicalisme côtoie de très près l’engagement politique. Et il y a un pas à faire entre la défense des intérêts matériels et moraux de ta corporation et la défense des intérêts du peuple, à travers un engagement militant, dans le cadre d’une formation politique», renchérit l’ancien chargé des revendications du syndicat des impôts.
Affecté tour à tour au Centre des professions libérales, au Centre des grandes entreprises, à la Brigade des vérifications, entre l’actuel chef du bureau des contentieux à la Direction de la législation et de la coopération et le président du leader du Pastef, l’alchimie allait quasiment de soi. Même région de naissance, même parcours académique, même profession, même trajectoire syndicale, mêmes aspirations patriotiques.
Cependant, contrairement à Guy Marius Sagna et Birame Souleye Diop, Bassirou Diomaye Faye ne dispose pas jusqu’ici, d’une fonction élective. Il a été battu lors des locales de 2022 à Ndiaganio par Tening Sène, candidate de Benno bokk Yakaar (Bby) et n’a finalement pas pris par aux législatives de la même année parce qu’étant investi sur la liste des titulaires de Yewwi Askan wi invalidée par le Conseil constitutionnel.
Aujourd’hui, tout comme Ousmane Sonko, il est également dans les liens de la détention provisoire même si, contrairement à celui-ci, son éligibilité n’est pas encore en jeu.